Pour beaucoup de gens, Marguerite Duras c’est l’Amant de Jean-Jacques Annaud, avec la voix off de Jeanne Moreau. Ce n’est pas faux en soit, mais faire un remake de ce film pour chaque impro de cette catégorie risque de lasser l’arbitre. Notons d’ailleurs à ce sujet que la voix off est un choix de Annaud, non de Duras.
Comme pour les autres catégories, cet article est basé sur peu d’œuvres de l’auteur, mais il a le mérite d’exister. Pour Duras, c’est l’Amant de Annaud mais et le romain « Un barrage contre le pacifique ».
Les romans de Duras sont d’abord des œuvres de femme, en cela que le ressenti et les sentiments ont une place prépondérante dans l’histoire des personnages et dans ce qu’ils communiquent au lecteur. Duras ne juge pas, ne décrit que les faits, mais ceux-ci sont pourtant chargés émotionnellement, et tout cela se transmet par l’exposition de la situation devant les yeux du lecteur.
Cette situation est bien souvent tragique, même lorsque la mort n’est pas présente. S’il arrive aux personnages de rire, ce qui se joue est profondément triste : c’est une famille qui va vers son éclatement, un couple qui ne parvient pas à s’aimer, deux amants que le destin éloigne l’un de l’autre, une petite fille, une dame et un chant en huit clos lors du bombardement de leur ville.
Parce que cela a fait partie de la vide de Marguerite Duras, les colonies françaises en Indochine dans les années 1920 sont très présentes dans son œuvre. Il sera ainsi intéressant de se renseigner sur le décorum de cette période et de cette région du monde, notamment sur leurs différentes classes sociales.
Dans « Un barrage contre le pacifique » comme dans « L’Amant », Duras dépeint avec justesse le contraste entre les classes aisées qui ne manquent de rien, celles moyennes qui vivottent et les plus pauvres souvent dans le dénuement le plus total.
Avec tout autant de justesse et de pertinence, Duras sait dépeindre les rapports familiaux, les conflits qu’ils recouvrent, les tensions qui les habitent, et les effets que le temps produit sur eux.
Pour résumer, et afin de fournir aux improvisateur une trame pour cette catégorie, l’improvisation pourrait avoir les caractéristiques suivantes :
- Seulement deux ou trois personnages principaux, les autres ne sont là que pour servir l’histoire sur de brèves périodes -* La situation de départ est difficile, et elle va en empirant au cours de l’histoire, mais pas nécessairement de façon importante
- La situation qui se joue devant les spectateurs doit, sans que cela passe par des mots (hors voix off mais c’est une solution de facilité) leur transmettre ce que ressentent les personnages, au travers de leur quelques gestes, quelques mots, quelques regards
- L’Indochine peut, faute d’autre idée, servir de lieu, mais le milieu du XX ème siècle doit servir de temps
- Sans plus de contrainte que l’Indochine, la relation entre un homme et une femme peut être le sujet principal de l’histoire. Bien faire attention dans ce cas à ce que celle-ci soit présentée du point de vu de la femme. Pour cette raison, il est préférable que le lead d’une impro de cette catégorie soit confiée à une seule joueuse, plutôt qu’à un joueur ou à plusieurs avec passage de lead
- Enfin, on peut aussi exploiter les relations entre plusieurs membres d’une même famille et/ou ce qu’il y a de tragique dans le contraste entre des représentants de différentes classes sociales, entre ceux qui ne manquent de rien et ceux qui sont dans le plus grand dénuement
Sources :
Écrire de Marguerite Duras
Eros et Thanatos…
Livres de Marguerite Duras